La valorisation financière des marques : un instrument de pilotage stratégique des entreprises.

A la mi-Août 2006, DELL puis APPLE étaient obligés de rappeler des batteries SONY défectueuses. L'impact direct de cette opération a coûté 200 millions d'euros à SONY, soit le quart de ses bénéfices annuels ! Bien évidemment, la valeur boursière des entreprises impliquées a directement souffert de cette baisse de résultats ! Mais en fait, l'expérience montre, que c'est l'image " dévalorisée " de ces marques qui risque le plus de pénaliser durablement le cours de bourse de ces entreprises. Souvenons nous de l'affaire PERRIER aux USA il y a une dizaine d'années ! Ou plus proche de nous, les " affaires " Société Générale et LGT Bank en hiver 2008.

Début Décembre 2006, le rapport Lévy-Jouyet (Maurice Lévy, Président du Groupe Publicis, et Jean-Pierre Jouyet, Chef de l'Inspection des Finances) rédigé à la demande de Thierry Breton, Ministre de l'Economie et des Finances, afin de définir le périmètre de l'économie immatérielle, ainsi que son implication sur la croissance française, était présenté à la presse. De cette mission, ressort notamment et très clairement le rôle de "l'idée de marque" ainsi que celui du design et de la publicité en faveur des marques comme autant de leviers de valorisation des produits et services à forte valeur ajoutée, contribuant ainsi également et fortement à la création de richesses pour l'économie nationale. L'une des mesures préconisées est d'ailleurs d'accorder certains avantages fiscaux liés à la propriété intellectuelle des marques, ... L'un des exemples emblématiques de cette politique économique de survaleur, est le cas de la marque "LOUVRE" : combien vaut-elle (700 millions d'Euros selon Le Monde du 21/01/07 !) ? Pourquoi ne pas profiter de cette richesse pour ouvrir et exploiter, comme l'a fait la Fondation Guggenheim et plus récemment la Sorbonne, des "annexes", filiales ou institutions soeurs à l'étranger ?! Et même certaines personnalités du sport (cf David Beckham) ou des variétés (cf Johnny Hallyday) ont déposé leur nom en tant que marque dans des conditions fiscales attrayantes. Le Figaro du 10/07/07 révélait aussi que la marque "HARRY POTTER" valait ainsi 4 Milliards de Dollars ! Pour mémoire, la marque "ORANGE" est valorisée dans les comptes de France Télécom pour 4 Mllds d'euros ..alors que les spécialistes l'évaluent aujourd'hui, selon son Directeur Financier Groupe, à ...9 Mllds d'euros ! Et la valeur de la marque "ROTHSCHILD" (cf Challenge du 01/02/07) estimée à 4 Mllds au moins, montre bien comment celle-ci a su devenir même un label et une griffe légendaires, pérennes et ...rentables ! Et quand ACCOR réveille la que "PULLMAN", c'est sans doute parce que cette marque représente un meilleur support de valeur dans le secteur de l'hôtellerie de grand luxe.

Aujourd'hui, la mesure régulière et précise de la valeur financière des marques est devenue incontournable, et ce, pour l'ensemble des acteurs concernés : les fabricants, les distributeurs, les agences de communication, les entrepreneurs, les institutions financières et les inventeurs ! 

L'EVALUATION FINANCIERE EST DEVENUE AVANT TOUT UNE OBLIGATION LEGALE NOUVELLE DANS DE NOMBREUSES CIRCONSTANCES : 

La nouvelle législation comptable et financière impose dorénavant, notamment lors d'opérations de haut de bilan, aux entreprises d'inscrire en haut de leurs bilans la " juste valeur " de l'ensemble de leurs actifs, y compris celle de leurs actifs immatériels, comme leurs marques par exemple, afin de mieux rendre compte, en les " activant " dans leurs comptes, de l'évolution réelle de leur patrimoine. Et une dévalorisation brutale d'une marque peut ainsi générer également une perte exceptionnelle non amortissable tout autant brutale ! Or il est probable que, non seulement cette valorisation s'impose lors d'acquisitions, fusions, cessions, associations, entrées en bourse, entrées au capital de fonds d'investissement, mais aussi de plus dans le cadre de la clarification de la stratégie des entreprises et de leurs leviers les plus efficients au sein d'une économie en cours de dématérialisation croissante.. et ce à chaque fois que l'on souhaite faire apparaître la vraie valeur et son potentiel à venir, d'une entreprise ! Cette mise en transparence et en comparaison concurrentielle sur un même marché, permet aux managers et actionnaires, d'une part d'identifier ses points forts et faibles, et d'autre part sortir d'une vision seulement financière.
Les règlementations et les méthodes nouvelles rendent pour l'instant la re-évaluation régulière (par ex. tous les 2 ans), ni satisfaisante, ni appliquée ...

Pour faire face à l'évolution de ces nouvelles obligations comptables et à de nouvelles orientations stratégiques, les Directions financières des entreprises, les Experts-comptables, les Commissaires aux Comptes et autre Auditeurs s'équipent tous progressivement de méthodes, qui toutes posent encore quelques problèmes (ex. répartition entre pays de la valeur d'une marque internationale ?, gestion du retour à une revalorisation forte d'une marque après avoir enregistré précédemment une mauvaise période ayant généré une perte exceptionnelle ?) mais au moins, ont l'avantage d'exister. 

Certains cabinets anglo-saxons (qui ont déjà le même problème à résoudre aux Etats-Unis), sont bien placés, comme par exemple ACCENTURE du fait d'une forte expérience en marketing stratégique ainsi que dans l'audit des dépenses média (via leur filiale MEDIA AUDIT), ou alors encore KPMG, PRICEWATERHOUSE COOPERS, MAZARS, BOOZ ALLEN HAMILTON, et WOLF OLINS (cf article paru dans Les Echos le 14 juin 2006 sur les " 10 attributs d'une société concurrentielle orientée sur la marque "), dont les recherches montrent que les entreprises ayant une vraie culture de marque, affichent des marges brutes d'exploitation deux fois plus élevées que leurs concurrents ! Enfin, d'autres sociétés spécialisées comme ERNST & YOUNG, SAS FINANCE, FINANCE & STRATEGIE, MAR-TECH & FINANCE, GOODWILL MANAGEMENT, l'INPI, viennent de fonder ensemble un " Observatoire de l'Immatériel " visant à étudier, partager et proposer des outils de mesure de la survaleur immatérielle des entreprises cotées en réponse aux nouvelles obligations comptables imposées par les normes IAS-IFS concernant la " fair value " de leurs actifs immatériels. 

Cet observatoire ci-dessus liste 8 actifs immatériels : le client, les ressources humaines, l'organisation, l'informatique, les fournisseurs, le savoir, les actionnaires et les marques. Cet outil permet la mise en place d'un baromètre permettant de mesurer, évaluer, suivre et donc d'optimiser la valeur de ces actifs (voir www.observatoire-immateriel.com et http://martech.customers.artful.net/Portal/main.do). Pour la marque, 3 paramètres ont été retenus : la " force de marque " (notoriété, loyauté clients, portefeuille, contentieux en contrefaçon, satisfaction & adhésion, connaissance fonds de marque, potentiel d'internationalisation, positionnement, part de marché), la " rentabilité de marque " (price premium marque, price premium marché, price premium concurrence, taux de redevance interne/transfer price) et les " investissements de marque " (taux d'évolution des dépenses de publicité, évolution du ratio dépenses pub/EBIT sur 5 ans, évolution du ratio dépenses pub/CA sur 5 ans, part de voix de la marque dans les média). 

Par contre, les sociétés de conseils proches du monde de la communication offrant le service le plus sophistiqué et expérimenté dans l'évaluation financière des marques, sont de grands réseaux d'agences internationales de design comme INTERBRAND (Groupe OMNICOM), ou CARRE NOIR (Groupe PUBLICIS) en coopération avec l'Association des Experts en Evaluation d'Entreprises et le cabinet d'expertise comptable AUBART & ASSOCIES , certains instituts d'études marketing comme la SORGEM (avec le Professeur de l'Université Paris-Dauphine Maurice Nussenbaum, Expert près les Tribunaux) ou ADWISE associé avec BRAND FINANCE, réseau international de conseils en évaluation financière de marques) en France, des cabinets de création de noms de marque, comme NOMEN. Certaines agences de publicité comme YOUNG & RUBICAM, groupe WPP (et d'autres groupes appartenant à PUBLICIS, HAVAS, OMNICOM, IPG,...) offrent un outil international d'analyse comparative et de pilotage des marques , et certains cabinets de conseils en études & stratégie de marque comme BRAND & BUSINESS (DDB France/Omnicom), BRAMAN, ALAIN POIREE CONSULTANT, BEC INSTITUTE, BRAND CITY (Groupe HIGH-CO / WPP), JPL CONSUTING, R.O.I., INSIGHT MARQUES, CREATIVE BUSINESS, BRIJATOFF & BRIJATOFF, MCPS CONSEIL, Hélène Michaud, Jean-Marc Lehu, ainsi que d'autres agences de design ( ex LANDOR, DRAGON ROUGE, DESGRIPPES GOBE, SAGUEZ & PARNERS avec sa filiale conseil DES FAITS DES ACTES,...) proposent des méthodologies structurées intégrant plus ou moins l'aspect économique des marques, ou en tout cas les leviers y concourant. Enfin certaines agence d'une nouvelle génération intégrant le conseil stratégique de marque et l'idée stratégique de communication, comme Né KID (filiale de NAKED Int'l), NYLON (WPP), THE SOURCE (OMNICOM), RELOAD (PUBLICIS), LA CHOSE ou FFL sont également bien armées ! 

Jean-Noêl Kapferer, Professeur à HEC, et expert en stratégie de marque, fut l'un des premiers spécialistes à faire l'inventaire des différentes méthodes possibles ( tout en recommandant celle qui valorisait le surcroît de cash-flow généré par une marque par rapport à une autre) dans son ouvrage " La marque " publié en 2002 chez Dunod. Un autre livre plus récent fait également le point sur le " juste prix " des actifs immatériels (clients, brevets, marques, systèmes d'information, etc...) : " Valoriser le Capital immatériel de l'entreprise " d' Alain Fustec (Président de Goodwill Management) et Bernard Marois (Professeur à HEC), publié en Janvier 2007 aux Editions de l'Organisation.

Il est à noter aussi la réflexion en cours du SYNTEC-Conseil en Relations Publiques, s'interrogeant (cf colloque du 7 Mars 2007) sur les méthodes d'évaluation financière du capital " opinion " des entreprises, visant à valoriser leur réputation en haut de bilan. Les études, méthodes et baromètres de réputation d'entreprise proposées par les agences HILL & KNOWLTON et ZAP sont à cet égard très intéressantes. 

C'EST AUSSI LE REVELATEUR POUR LES ACTIONNAIRES ET LES INVESTISSEURS DU POTENTIEL DE DEVELOPPEMENT DE LA VALEUR DE LEURS ENTREPRISES : 

Il existe aussi d'autres sociétés qui cherchent à mesurer les performances des marques sous divers critères, qui tous viennent enrichir les outils d'évaluation financière des marques, comme par exemple l'institut BVA, qui avec l'AACC (Association des Agences Conseils en Communication), décortiquent et mesurent l'appréciation relationnelle des marques (cf article paru dans La Tribune le 8 Novembre 2006), ou comme l'agence de relations publiques HILL & KNOWLTON (cf article paru le 30 Mars 2006 dans Stratégies), identifie et pondère les critères de valorisation boursière retenus par les analystes financiers, comme par exemple l'aptitude à communiquer, la motivation du personnel, la transparence et la clarté de communication vers l'ensemble de ses publics parties prenantes (" stakeholders "), toutes valeurs véhiculées par les marques de sociétés cotées en bourse! D'autres institutions, comme par exemple l'UDA (Union des Annonceurs) ont mis en place des réflexions et des outils d'optimisation de la valeur des marques, de la fiscalité des dépenses de communication,... 

INTERBRAND publie ainsi chaque année dans L'EXPANSION (Juillet 2007) ainsi un palmarès mondial des marques classées selon leurs valeurs financières. Cette " Brand Valuation " se décompose en quatre phase : (i) l'analyse des données financières pour identifier la valeur ajoutée générée par la marque, égale à la somme des revenus de la marque, marché par marché, segment par segment ; (ii) la contribution de la marque à la détermination de ses revenus. Elle mesure alors le rôle de la marque, prépondérant par exemple dans le luxe, faible dans l'énergie ; (iii) la force de la marque, c'est-à-dire, sa capacité à sécuriser la demande future dans son environnement concurrentiel ;. (iv) la mesure de l'écart qui existe entre la marque étudiée et une marque " idéale " et fictive qui aurait la performance maximale sur tous les critères.
On arrive ainsi par cette méthode à identifier les revenus nets générés par la marque seule. 
Cette méthode a ainsi permis d'établir le classement des marques françaises selon leurs valeurs financières : 

1) LOUIS VUITTON... = 16,17 Milliards d' Euros, + 3,5% vs 2006
2) BNP PARIBAS………..= 5,85 M.E., +14,8%
3) AXA…………………...= 5,83 M.E., +16,6%
4) L'OREAL……… .. = 5,60 M.E., +5,,2%
5) CHANEL……….… ….= 4,64 M.E., +12,1%
6) SOCIETE GENERALE.=4,49, +23,7% (avant crise janvier 2008)
7) ORANGE……………...= 4,32 M.E., +36,5%
8) CARREFOUR :……….= 4,27 M.E., +9%
9) DANONE……………. = 3,99 M.E , +3,5%
10) LANCOME…………... = 3,50M.E., +1,5%

…suivis dans l'ordre par :
HERMES, CARTIER, MOËT & CHANDON, HENNESSY, PEUGEOT, RENAULT, CITREN, DIOR, LACOSTE, EVIAN, MICHELIN, REMY MARTIN, TOTAL, JCDECAUX, BIC , … 

Les enseignements tirés de cette étude montre à l'évidence que, plus qu'une simple appellation , la marque est une machine à susciter et à sécuriser la demande des consommateurs, en permettant à l'entreprise de pratiquer des marges supérieures, et donc de générer de meilleurs résultas financiers et, in fine, la survalorisation financière de l'entreprise.
Les règles de ces grandes sociétés ont toutes en commun de : (1) se déployer sous une bannière unique, (2) se trouver un créneau et faire valoir sa différence, (3) faire de sa signature une garantie d'excellence,(4) travailler son image pour accroître sa notoriété, (5) protéger son identité pour en assurer la prénnité.

Une autre méthode mise en œuvre par l'institut d'études marketing MILLWARD BROWN (Groupe WPP), complémentaire à celle ci-dessus, permet également un classement " Brandz Top 100 " des marques selon leurs valeurs financières, en se fondant sur (i) l'analyse du bilan financier des entreprises, (ii) la contribution de la marque aux revenus dans une situation de changement de marque sur un secteur, (iii) la capacité de la marque à se développer plus vite que d'autres sur son secteur. Cette étude, publiée dans Le Figaro le 28 Avril 2007, donnait le classement mondial suivant des marques les plus " puissantes " :

1) GOOGLE :………..= 66,4 Milliards de Dollars U.S., +6% vs 2006
2) G.E…………….. = 61,9 M.D., = %
3) MICROSOFT……= 54,9 M.D., -2%
4) COCA-COLA….. = 44,1 M.D., -1%
5) CHINA MOBILE = 41,2 M.D., -1%
6) MARLBORO …..= 39,2 M.D ., -1%
7) CITI……………..= 33,7 M.D., +1%
8) WAL-MART….. = 36,9 M.D., -1%
9) IBM ……………..= 33,6 M.D., -1%
10) TOYOTA………. = 33,4 M.D., = %
20) VUITTON……….= 22,6 M.D., +4%


Palmarès suivi d'un classement européen : NOKIA, VOFAFONE, BMW, TIM,MERCEDES, TESCO, TELEFONICA MOVILES, HSBC, DEUTSCHE BANK, … 

Cette étude démontre l'émergence selon les critères ci-dessus des marques technologiques et celles venant d'Asie (Chine et Inde). Les marques les mieux placées sont celles qui ont une distribution maximale doublée d'une fréquence d'achat élevée. 

Enfin, et toujours dans le registre des classements de marques selon leur valeur financière, le cabinet international d'évaluation financière des marques, d'origine britannique, BRAND FINANCE associé à ADWISE en France, a publié le lundi 26 mars 2007 dans Les Echos et dans Stratégies le 29/03/07. leur palmarès mondial établi selon leur propre méthodologie mixant informations financières publiques, données marketing et royalties, permettant de mesurer la contribution à la valeur financière d'une entreprise : 

Le top 10 des marques les plus cotées au monde :

1) COCA COLA 
2) MICROSOFT 
3) Citi 
4) Wal-Mart 
5) IBM 
6) HSBC 
7) GE 
8) Bank of America 
9) Hewlett-Packard 
 10) Marlboro 

Les plus fortes contributions à la valeur des entreprises : 

1) NIKE : 84% 
2) PRADA : 77%
3) ACER : 71%
4) Avon : 68%
5) Bulgari : 68%
6) Chanel : 66% 
7) Estée Lauder : 61% 
8) Quicksilver : 60% 
9) Calvin Klein : 58% 
10) Adidas : 56% 


Les 10 marques françaises les plus valorisées :
14) L'OREAL : 20,05 Mds USD
22) LOUIS VUITTON : 22,97 Mds 
40) AXA : 14,39 Mds USD
49) BNP-PARIBAS 12,28 Mds
52) GUCCI : 11,66 Mds USD
59) CHANEL : 10,74 USD
60) ORANGE : 10,72 Mds USD
63) CARREFOUR : 10,51 Mds 
73) AUCHAN : 9,49 Mds USD
96) Sté GENERALE : 7,88 Mds


Un très intéressant article du 19/04/07 du Nouvel Economiste commente d'ailleurs cette étude de BRAND FINANCE ainsi que l'OBSERVATOIRE DE L'ECONOMIE IMMATERIELLE. 

Fort de ces nouvelles obligations comptables et du foisonnement de méthodes, l'AFNOR vient d'ailleurs de démarrer un chantier sur une norme internationale ISO ! 

D'autres sociétés, comme NOMEN, leader de la recherche et de la création de marques, ont développé également leurs propres méthodologies. Dans le cas de cette dernière société, sa méthode repose aussi bien sur une expertise financière et comptable classique, que sur les variables non-linéaires liées à la marque, en les séparant des autres composantes du mix. Ainsi, dans Le Figaro du 01/11/07, Marcel Botton étend même son analyse fondée sur 23 critères à des " marques " culturelles comme " Goncourt " qui vaudrait 15 millions d'euros. Certains cabinets d'expertise-comptable, comme AUBART & ASSOCIES, ou de conseil juridique en propriété industrielle, comme BEAU DE LOMENIE, s'attachent également à conseiller leurs clients sur ce sujet. Le cabinet de dépôt et de protection de marques LEGITINAME a même évalué sur certains secteurs (par ex, dans l'hôtellerie de luxe) , la rentabilité d'une protection rigoureuse des marques, en mesurant et le manque à gagner et les indemnités en cas de contrefaçon de marque… 

En fait, comme la société THE GOOGWILL COMPANY (filiale de SAATCHI & SAATCHI, Groupe Publicis) l'indique dans Le Figaro du 12 juillet 2006, la financiarisation croissante de l'économie mondiale oblige aujourd'hui les entreprises à traduire la valeur qu'accorde un client aux bénéfices immédiats et potentiels affectés à un produit ou à un service selon son revenu disponible, en valeur financière visible, mesurable et donc … gérable ! 

Une façon plus simple de rappeler ce qu'est une marque par rapport à un simple produit, est d'identifier ce " supplément d'âme ", levier subjectif sinon émotionnel parfaitement immatériel qui " fait vendre plus rapidement, plus souvent et plus longtemps un produit à plus de clients, sur plus de segments de marché, au travers de plus de canaux de commercialisation, à un prix plus élevé " : on en comprend ici tout de suite les conséquences et donc la valeur que peut induire un tel " avantage concurrentiel caractéristique durable " de marque ! En fait, la marque est devenue pour de nombreuses entreprises leur principal " droit au profit ", sinon leur seule raison d'être pérenne! 

C'EST ENFIN UNE APPROCHE NOUVELLE DU MANAGEMENT DES MARQUES AU QUOTIDIEN : 

L'utilité de l'évaluation financière des marques ne réside pas seulement dans une préoccupation bilancielle légale (cf ci-dessus), mais aussi d'une manière extrêmement concrète, dans les opérations de fusion, d'acquisition, de cession, d'association , d'apport, de délocalisation, d'introduction en bourse et d'offre publique d'achat d'entreprises ou de certains de leurs actifs. Là, bien évidemment, une valorisation, fine, argumentée et précise est déterminante. 

Un exemple récent (cf Stratégies du 12/07/07) est celui de BNP PARIBAS qui a décidé de se doter d'une véritable " Direction de la Marque, de la Communication et de la Qualité ", étant ainsi la première entreprise française adaptant sa structure organisationnelle à la mise en œuvre de sa stratégie en se donnant les moyens de faire converger tous ses efforts immatériels vers plus de valeur lisible auprès de ses publics. 

Autre situation, où l'évaluation financières des marques est très utile, c'est dans l'activité commerciale de " licensing ", qui en exploitant plus ou moins bien une marque reconnue ou même inactive, peut accroître ou au contraire appauvrir la valeur d'une marque et donc du patrimoine de son propriétaire, plus ou moins rapidement. Il est alors crucial pour le propriétaire d'une marque d'assujettir cette exploitation à une mesure régulière de l'évolution de la valeur de marques faisant l'objet de telles licences . Seule une telle exigence pourra permettre la pérennité et l'extension future des marchés possibles exploitables par une licence de marque Tout le monde se souvient, comment YVES SAINT-LAURENT récupéra toutes ses licences pour empêcher tout galvaudage de sa marque, ce que CARDIN ne sut pas toujours faire aussi bien !
Une étude réalisée par l'agence spécialisée KAZACHOC parue le 15 mai 2006 dans CB NEWS évalue même le marché mondial des licences à 108 Milliards de Dollars U.S.. La justification principale de ce business est la possibilité d'émerger rapidement à moindre coût face à des marques concurrentes déjà bien installées. 

Même le secteur de la téléphonie mobile exploite les licences de marques aussi célèbres que HUMMER, PRADA, LEVI'S qui ont eu pour effet (cf Le Figaro du 31/05/07) de tripler les ventes des licenciés. 

Phénomène nouveau en forte croissance, repéré par MARKETING STORE : l'attractivité des célébrités et autre " people " qui peu à peu remplacent les héros imaginaires (cf cinéma, etc…) ou d'autres marques issues de marchés voisins ! 

Par contre , il reste encore un domaine crucial dans lequel la gestion financière des marques s'avèrera déterminante, même si aujourd'hui - à part dans les secteurs du luxe, de la mode et de la beauté - très peu d'acteurs en sont vraiment conscients ou en appréhendent même les techniques nécessaires ! Il s'agit de la gestion financière des marques par les services de marketing et communication des entreprises ainsi que par leurs agences de communication … 

En effet, la gestion actuelle des marques par les professionnels du marketing et de la communication, s'articule traditionnellement autour d'un objectif d'optimisation du rapport ventes / dépenses marketing & communication, intégrant un critère de productivité du budget global de communication en termes de développement de l'image, de la notoriété et du volume de contacts clients potentiels. Le but habituellement poursuivi -parfaitement légitime et incontournable- reste en priorité la protection et l'accroissement de la contribution de ces dépenses à la rentabilité opérationnelle annuelle, en bas de bilan donc, de l'entreprise. 

Or, plusieurs phénomènes macro et micro-économiques rendent cette recherche d'optimisation seule du " Retour sur Investissement " (R.O.I.) annuel insuffisant, sinon même parfois trompeur ou dangereux à terme, particulièrement pour les entreprises cotées en bourse soumises à la dictature des effets d'annonce de résultats trimestriels, si l'on n'intègre pas également à l'orientation stratégique d'une politique de marque, une recherche de l'optimisation également du " Retour sur Capital " (R.O.E) investi, valorisant l'ensemble de ces actifs immatériels de marque :

 

  • les nouvelles réglementations comptables de transparence et de sécurité financières imposent aux entreprises de faire apparaître dans certaines circonstances en haut de bilan l'évolution de la valeur de leurs marques, or celle-ci est directement dépendante de la qualité des choix retenus en matière de politique de communication & marketing ;
  • les actifs incorporels des entreprises, notamment leurs marques (ainsi que les multiples savoir-faire qu'elles recouvrent et conjuguent), sont devenus du fait d'une délocalisation massive et croissante de leurs outils de production vers d'autres régions du monde à très faible coût de main d'œuvre (ex : l'Asie), bien souvent et durablement les principales sources de richesse des entreprises occidentales. Il est donc devenu primordial, au sein de notre économie financière devenue mondiale, de protéger, optimiser et mesurer la valeur des marques sous toutes ses formes. Le jour où la Chine ou l'Inde saura gérer et exporter aussi bien que nous leurs marques, assises sur des usines que nous leur avons financées avec nos commandes industrielles, le sort de notre société sera alors vraiment engagé dans un déclin irrémédiable ! La Ville de Shanghaï, en s'en prenant ouvertement (cf Le Figaro du23/01/07) aux " grandes marques " de luxe implantées dans la métropole (voir site web du SIMCA) n'est elle pas en train de préparer l'offensive des marques chinoises ?
  • la guerre générale des prix, alimentée par l'hyper-concurrence , la grande distribution, la presse et parfois les associations consuméristes, dans laquelle, selon l'UDA (Union des Annonceurs), une réduction du prix de vente de -1% se traduit actuellement par une baisse des dépenses publicitaires de -15%, va obliger les fabricants à très rapidement devoir choisir entre d'une part une réduction à court terme de leurs gammes et de la qualité de leurs produits, et d'autre part à moyen terme un réinvestissement dans l'innovation , des services associés attractifs, et ….donc à surinvestir à nouveau en communication.

La conséquence en est, pour tous les services marketing et agences de communication, que la marque doit dorénavant être considérée comme le principal vecteur à effet de levier de la stratégie et de l'organisation des entreprises. Ce qui a pour conséquence directe que l'ensemble des fonctions de l'entreprise doivent exprimer sur leurs territoires respectifs un même " dessein de marque ", que ce soit à l interne comme l'externe, au plan stratégique comme au plan tactique, à long, moyen et court termes, au plan local ou national comme au plan européen ou mondial ! 

Ce phénomène est particulièrement sensible aussi lors des grandes opérations de fusion d'entreprises. Capital Finance (16/04/07) démontre bien comment la marque, utilisée comme outil de management, par son pouvoir d'identification et de mobilisation, peut être un levier efficace dans un rapprochement " fusionnel " 

Il s'agit donc aujourd'hui, non plus de réfléchir et décider en termes de budgets marketing ou de communication, mais plutôt en termes de " budget de marque " réconciliant en une continuité parfaite les objectifs de " Retour sur Investissement " ( reflétant la valeur ajoutée profitable de l'entreprise) et ceux de " Retour sur Capital " (reflétant la plus-value enregistrée, attendue ou latente de l'entreprise). 

L'ensemble des investissements (et donc non plus des " dépenses "), stratégies et programmes de communication & marketing devront ainsi être conçus, gérés et mesurés en priorité dans l'objectif commun final d'une " appréciation " (ou optimisation) financière du patrimoine de marques de l'entreprise, au profit de ses actionnaires.
Les seuls critères d'image, de notoriété ou même de vente n'auront plus beaucoup de sens, s'ils ne servent pas directement la stratégie financière mesurable de l'entreprise et de ses actionnaires !
Il vaut mieux ainsi parfois savoir sacrifier une opération promotionnelle de " cassage de prix " visant à satisfaire à des prévisions de vente à court terme, que de susciter le déclin d'une marque à moyen ou long terme. 

Il appartient donc aux agences, instituts d'études, cabinets de consultants, distributeurs, supports, fabricants et aux annonceurs de concevoir et élaborer de nouveaux instruments communs de pilotage pluridisciplinaire des marques visant à alimenter la stratégie financière de l'entreprise au travers de l'optimisation nécessaire de l'allocation des ressources budgétaires aux moyens de plus en plus nombreux et fragmentés de communication, déployés autour d'un concept durable, évolutif et " valorisant " de marque ! 

Deux aspects parfaitement complémentaires devront être pris en considération dans l'élaboration d'une méthode de management stratégique des marques : 
 

  • les outils de gestion financière des marques et des investissements de communication

  • les outils d'élaboration d'une stratégie de valeur de marque

1) Les outils de gestion financière des marques et des investissements de communication: 
Cette nouvelle méthode issue des recherches originelles en " brand's economics " de l'Université de Chicago, reposera obligatoirement sur la meilleure péréquation possible entre les quatres composantes économiques suivantes :

  • le " pricing " : fixation d'une politique de prix de produit ou de service, optimale, évolutive et adaptée à la situation du marché (cf travaux du cabinet spécialisé en pricing management SKP CONSULTING cf article paru dans Les Echos le 14 Juin 2005, ainsi qu'ouvrage publié aux Editions Nouveaux débats publics : " L'Odyssée du prix . Vie chère, low cost, gratuité, une phénomologie des prix " de Philippe Lentschener, Président de Publicis France) ;
  • le " budgeting " : fixation et optimisation du montant global et de la répartition des investissements de marque entre :
    • les différents marchés internationaux, nationaux et régionaux,
    • les différentes périodes de référence : long-, moyen-, court, -termes ,
    • les objectifs de contribution au Retour sur Capital (ROE) et au Retour sur Investissement (ROI),
    • les publics exploités, stratégiques (ex les investisseurs) et tactiques (ex les clients),
    • les publics internes (ex les commerciaux) et externes (ex les distributeurs),
    • les moyens de communications image (ex publicité, design) et opérationnelles (ex marketing relationnel & interactif). Cf travaux de CARAT (répartition des investissements) et d'OCCURRENCE ( cf efficacité des programmes) sur ces sujets;
  • la " brand equity valuation " : évaluation et optimisation de la valeur financière des marques (cf travaux d'INTERBRAND , SORGEM, NOMEN et MILLWARD BROWN).
  • L'optimisation fiscale des marques et des dépenses de communication, comportant :
    • d'une part, la délocalisation des marques et de leur exploitation financière, commerciale et industrielle dans des véhicules juridiques et financiers (de type " brands holding) " basés dans des pays à la fiscalité favorable à la propriété intellectuelle (cf Suisse, Irlande, Monaco, Luxembourg, ou…la Macédoine qui offre un " incentive " fiscal très attractif pour es marques internationales !) ;
    • d'autre part, le retraitement fiscal de certaines dépenses de communication à effet durable, en investissements amortissables (cf design, évènements, …) ;

    2) Les outils d'élaboration d'une stratégie de valeur des marques (cf méthodes type Y&R, BRAMAN, ALAIN POIREE CONSULTANT, JPL CONSULTING, BEC INSTITUTE, ROI, ...) :
    Conception et planification dans le temps et l'espace d'un concept de marque visant à intégrer dans les politiques habituelles de marketing et de communication :

  • une idée de marque fondée sur une source de légitimité originale, compétitive, protégeable durable et exportable, d'autant plus forte et pérenne qu'elle repose autant sur des caractéristiques objectives (rationnelles) que sur des valeurs subjectives (émotionnelles), autorisant un prix de vente et une rentabilité supérieurs sans dépendance à un dumping promotionnel ;
  • un potentiel d' offre et d'expression alimentant facilement (i) une communication image influençant l'attitude des audiences et des consommateurs visés, (iii) un marketing opérationnel & relationnel agissant sur le comportement des clientèles ciblées, et (iii) une information nourrissant l'opinion publique, les relais d'opinion et les institutions ;
  • un périmètre de marque évolutif permettant d'anticiper son élargissement progressif , harmonieux, rapide, crédible et économique vers d'autres produits, d'autres segments, d'autres marchés, d'autres réseaux de distribution, d'autre pays, d'autres clients,…

Ici, le concept de " marque chaude " vs " marque froide " (cf théories du sociologue canadien Marshall Mc Luan sur les " médias chauds " vs " médias froids "), intégrant de l'interactivité, de la personnalisation, du service après-vente, de la disponibilité, une garantie qualité, de la sécurité, du civisme, de l'écologie, de la solidarité humanitaire (etc…), vient se substituer à l'institutionnalisation de marques " souveraines " vieillissant plus vite ! 

Si par exemple, on analysait le cas des marques les plus souvent élues " Produit de l'Année " au Grand Prix Marketing Innovation ces dernières années, il est fortement probable que l'on constaterait un rapport logique entre , d'une part, leur survaleur financière par rapport à leurs concurrents, et d'autre part, leur politique de prix de vente et d'investissement en communication, d'autre part ?! 

Et la tendance " lourde " actuelle, pour certains services achats puissants de fabricants, enseignes de distribution et centrales d'achat d'espace, de privilégier la simple réduction des coûts, des budgets et des prix face à une offre d'idées nouvelles et de qualité en communication, de produits ou de services, ne va certainement pas dans le bon sens ! Cela provient souvent de la concurrence interne entre les Directions financières, commerciales, marketing et communication au sein des entreprises, à qui cet objectif commun de stratégie financière de marque à long terme fait aujourd'hui encore cruellement défaut ! 

De nombreux ouvrages sur la marque ont été publiés, notamment par Jean-Noêl Kapferrer, Professeur à HEC , Georges Lewi, Professeur Associé à HEC et à Genève, Jean Watin-Augouard (" Marques de toujours "), Bernard & Dora Logié (" Leur nom est une marque ") , Charles Le Peu (" Livre des grandes marques "), Naomi Klein (" No logo "), Edouard de Broglie (" Marques face à l'éthique "), Mar Drillech (" Le boycott "), …Et deux revues se consacrent à ce sujet : " La Revue des Marques " éditée par PRODIMARQUES, le lobby des grandes marques internationales, et " Tous les jours les marques " éditée ponctuellement par les guides " Tous les Jours ". Enfin, la société DEMONIAK propose une " Bourse des Marques ", et LAGO, une " Galerie des Marques ", alors que le site " www.visiobrand.com " se veut une vitrine interactive des grandes marques. 

publié le 16 Mars 2017